des grillons dans les arbres


8. Absence totale de lune et profond silence à peine troublé ici ou là par le plouf d’une grenouille ou le saut d’une carpe. « Il y a des grillons jusque dans les arbres ?» demande l’amie de ma nièce. Oui. Les très rares sons se réverbèrent sur les murs du château avant de s’évanouir dans l’espace. Dans le ciel scintille une rivière de diamants. (Même la nuit sarthoise est contaminée par le bling bling). Voie lactée que suivaient les morts pour aller vers d’autres univers dans la mythologie des indiens d’Amazonie. On retrouve cette image dans la chanson du mal aimé, l’un des plus beaux poèmes d’Apollinaire :
« Voix lactée, ô sœur lumineuse
Des blancs ruisseaux de Canaan
Et des corps blancs des amoureuses
Nageurs morts, suivrons-nous d’ahan
Ton cours vers d‘autres nébuleuses ?
»
Trois générations dorment paisiblement sous ce toit, précédées par quinze autres dont les vies imprègnent encore ces lieux, jusqu’au fondateur. Un château, c’est comme un bateau : superposition d’espaces reliés par des escaliers, des coursives, des étages vastes comme des ponts du haut desquels on peut contempler une large variété de points de vue sur la campagne ou sur la mer environnantes. L’un comme l’autre sont animés d’une vie propre et voguent, à travers l’espace et le temps, de rivage en rivage, de génération en génération.

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