L’avion traverse un grand coin de ciel bleu
Paix, gratitude, ancrage,
Et, sur mon nez, la mouche

Publié dans Humour, Mouette Sans frontières
Tagué ancrage, méditation, paix, vivant
Le Génie du chêne et le Génie des pierres regardaient passer le Génie des mots sur un petit sentier de montagne étroit, glissant.
Il s’en sortait pluôt bien, sautillant de pierre en pierre, d’un pied sûr.
Hum, fit le Génie du chêne.
Oui, répondit le Génie des pierres.
Mais bon, fit le Génie du chêne.
C’est sûr, ajouta le Génie des pierres.
Lorsqu’il passa devant eux, le Génie des mots leur fit un geste amical et respectueux.
Bonjour les amis! S’écria t’il.
Tu vois, fit le Génie du chêne, un peu gêné.
Comme quoi, répondit le Génie des pierres.
Avant tout, corrigeons vite l’erreur commise dans la précédente chronique : selon une lectrice avisée, l’expression « prati.. o…/pratique » aurait fait apparaître sur son écran de nombreuses publicités d’une marque d’ameublement. BuenCarmino présente ses excuses à toutes les victimes de ce qu’on appelle en com’ digitale du « retargeting ». Pour éviter tout futur désagrément nous emploierons désormais l’expression « poético-pratique », qui correspond plus à notre projet.
N’espérez pas pour autant voir apparaître du Mallarmé sur vos écrans. Soyons réalistes : les sponsors ne se bousculent pas. Pour la poésie, nous ne pourrons compter que sur nous-mêmes.
Ce qui nous amène au sujet du jour. Il paraît que la douceur, l’émotion, la sensibilité sont tendance.
Dans la déco, le rose poudreux-moelleux triomphe (chérie, j’ai collé des macarons sur les murs).
Dans l’art contemporain, ce seraient, nous disent certains, « des formes rondes et pleines, qui évoquent la douceur et la sérénité » (même si la provocation, le décalé, le dur, le crissant, l’abject y ont toujours toute leur place en résonnance d’un monde anxiogène).
Sur les ondes de Radio France, on entend beaucoup de musique française de la fin du XIXème siècle depuis quelque temps. Debussy, Fauré, Ravel et même Vincent d’Indy sont plus connus pour leur célébration de la vie humaine et de la sensibilité que pour la mise en scène triomphale de la mort des héros et des dieux. Sur France Inter, l’émission « Grand bien vous fasse », grand succès de l’été, serait la plus podcastée en ce moment. D’ici à y déceler un grand besoin de bienveillance, il n’y a qu’un pas.
Mais attention !
Notre propos n’est pas ici d’ajouter plus de sucre à la guimauve lénifiante qu’on nous sert à longueur de journée. Dans le café gourmand, on apprécie que le café conserve tout son arôme et son amertume. Il ne viendrait à l’idée de personne d’y tremper sa cuiller de mousse à la mangue, n’est-ce pas ? Juxtaposer n’est pas mélanger. Le plaisir est dans les contrastes.
A ce marshmallow synthétique, pauvre en texture et en goût,
nous préférons une douceur allègre, appétissante, musclée. Celle qui fond dans la bouche après avoir fait pétiller les papilles. En somme, il faut qu’elle ait du corps et des tanins ouverts, comme les grands vins.
C’est la bienveillance des forts, ceux qui n’hésitent pas à poser des limites, affirmer leur point de vue, le défendre avec civilité, en changer si l’honnêteté le réclame, qui osent s’attendrir, s’émerveiller, vivre de puissantes émotions.
Une douceur virile, en quelque sorte.
Vous voilà perplexes ? Tant mieux !
Publié dans Humour, Musique, Poésie
Tagué art contemporain, douceur, Grand bien vous fasse, poético-pratique, radio
C’est sans doute la première et dernière fois que l’on verra la photo d’un bébé sur ce blog.
Non pas que l’on ait quoi que ce soit contre ces attendrissantes créatures, dont nous avons beaucoup à apprendre en matière de développement personnel, mais parce qu’il y a des quantités de mamans qui couvrent déjà ce sujet, avec beaucoup de compétence et de talent.
Au départ, cette chronique devait apporter une réponse au commentaire désespéré autant qu’expressif de notre ami M… suite à la dernière publication. Je le cite dans le texte (il va m’en vouloir à mort) : « chiotte », (il a bien écrit « chiotte », je n’invente pas, je ne déforme pas, c’est écrit comme ça, dans le texte, verbatim), « Chiotte… !! Tu nous as bercé tous l’été dans des moments sympas, nous permettant une évasion totale et lointaine…, Et voilà que tu nous remets dans le caca, comme dirait Christian Prigent, dans “Presque tout ! » Va falloir la chercher cette patate ! »
Et que voulez-vous répondre à cela, et à mon amie Christiane M… qui me demande, après la leçon de grammaire et les bonds de cabri, où je trouve des raisons de « garder la patate » ?
J’aurais pu évoquer la tribune de Cyril Dion dans le Monde la semaine dernière ou celle, plus ancienne, de Joseph Stieglitz, ou encore le livre de Jeremy Rifkin sur la troisième révolution industrielle, mais pour rester plus proche de nous j’évoquerai plutôt ce qui se passe en ce moment aux Grands Voisins, « le lieu le plus cool de tout Paris » cet été selon le site lebonbon.fr
Ce « village utopique en plein cœur de Paris », est une « fabrique de biens communs » (http://lesgrandsvoisins.org/). Installé sur le site de l’ancien hôpital Saint Paul en attendant sa prochaine démolition et sa renaissance sous forme d’éco-quartier, il accueille de nombreux résidents et partenaires. Migrants, jeunes et femmes en difficulté, bobos et porteurs de projets s’y côtoient dans une ambiance à la fois festive et productive. On ne fait pas qu’y jouer au scrabble ou boire des canons sur de la musique tendance : pendant la journée, ça bricole sec (Yeswecamp), de nouveaux partenaires s’installent chaque semaine (une annexe de la Ruche), l’agriculture urbaine se déploie dans toute sa succulente diversité en attendant la prochaine récolte de MIEL.
Du miel ? Eh oui ! Car parmi les porteurs de projets se trouve mon ami Jérôme, apiculteur et animateur de l’association Miel de quartier (http://www.mieldequartier.com/. Selon son site web, Miel de Quartier, c’est concentré de biodiversité urbaine à haute teneur en relations humaines.
Et le bébé, dans tout cela ? Patience. J’y viens.
Comme mon ami Jérôme, qui a les yeux aussi gros que le rayon d’action de ses abeilles, s’est mis trois locaux sur les bras, je lui ai proposé un coup de main pour la rénovation. Nous voilà donc partis à lessiver, poncer, gratter les murs en attendant de pouvoir les repeindre pour accueillir correctement les visiteurs le 11 septembre prochaine (suspense).
Et donc, un soir, les pouces et la nuque endoloris, je m’apprête à franchir le portail du site pour rentrer chez moi. Instinctivement, je lève les yeux, et je vois inscrit sur le mur d’un des bâtiments : « maternité ».
Et là, flash-back : je me rappelle être déjà venu ici, il y a vingt-six ans, pour voir ma sœur qui venait d’accoucher de sa seconde fille…
Laquelle vient à son tour d’accoucher d’un adorable bébé.
Tendresse, promesse, les cycles de la vie nous parlent dans leur langage mystérieux.
Donc, voici la photo.
Buencarmino, le bloggeur qui tient ses promesses.
Publié dans Agir, Bonheur, Humour, La main heureuse, Paris
Tagué Bébé, Grands Voisins, hôpital, maternité, Miel de quartier, naissance, optimisme, patate, ruches, solidarité urbaine
On est rentrés mais on dirait qu’on n’aurait pas mal au cœur. Sortir, humer l’air de la capitale, voir des amis. Pique-niquer au bord de la Seine après avoir revu Talons aiguilles, d’Almodovar.
C…, grande lectrice, militante, généreuse et subtile, s’enflamme contre les gens qui parlent de rentrer « sur Paris ». (Oups, j’ai commis ce crime, à force de l’entendre, on s’en imprègne …)
Quand je vous disais qu’il y a de belles colères.
Tout de même, il y a des journées qui piquent : obstacles administratifs, erreurs, URSSAF, RSI, mutuelle, dossiers, et des moments graves : hôpitaux, scanners, prises de sang, prises de tête. On donne son temps pour ceux qu’on aime.
On aimerait bien que les amis compatissent, qu’ils nous écoutent râler, qu’ils nous plaignent un peu. Mais les vrais amis ne sont pas faits pour ça. Les vrais amis ça sert à nous secouer. D’un mot, d’une phrase, comme l’ami J… qui commente sobrement : «eh oui c’est ça la vie d’adulte. Et c’est toujours mieux de faire trois fois des photocopies de dossiers perdus que de vivre dans un pays où tu perds ta main ou ta jambe parce que tu n’as pas de mutuelle ».
Ah oui, vu comme ça effectivement.
Plus tard, nous sommes dans son atelier d’apiculture aux Grands Voisins, en train de gratter un mur avant de le repeindre. Rien de tel qu’un peu de travail manuel pour vous remettre les idées en place.
Quand la Noirceur attaque (cette vieille adversaire a bien droit à sa majuscule, par égards pour son importance, sa nocivité et son ancienneté), plutôt que de crier « tous aux abris », prenons le parti de faire face et nourrissons-nous de son énergie. Vampire contre vampire ! Car même dans la Noirceur, il y a des pépites, des éclats de lumière. Mais pour les percevoir et les apprécier, il faut un oeil exercé. Ou de bons amis.
Le lendemain, au marché Corvisart, cri d’un vendeur : « achetez des pêches, ça donne la banane ! »
Et la poésie ?
La poésie, c’est la fraîcheur. Ce qui naît à l’horizon du silence, un calme propice à l’appréciation de la beauté. Ce que l’on vient chercher sur cette île, dans les marais rouillés, sur ses plages pailletées d’aluminium au couchant, et qui donne l’énergie de monter jusqu’au sommet du phare des Baleines pour l’éblouissement qui nous attend, tout là-haut. Après l’étroit escalier en colimaçon, déboucher sur la plate-forme à 360 degrés et contempler la houle de mer roulant à l’infini ses muscles bleus. Savourer la profondeur de cette immense masse liquide qui s’étend jusqu’à l’autre bord, les côtes des Amériques, peut-être Martha’s Vineyard. Rêver de cette île-soeur, ancien repère des chasseurs de baleines où mon amie G… va parfois se ressourcer. L’amitié se superpose à la splendeur du paysage, ses secrets ne sont pas moins profonds que ceux de l’océan.
Avoir l’Atlantique en partage, aimer, se souvenir. Voir déferler les vagues et ne pas s’en lasser. (Il y a de la poésie dans la vitesse, comme dans la lenteur). S’immerger dans tout cela, comme on se lave. Laisser se dissoudre les anciennes formes, les appréhensions, fondre avec bonheur dans la masse du monde.
Romain Rolland appelait cela le « sentiment océanique ». La méditation pratiquée avec persévérance permet d’atteindre cet état de communion avec l’univers, sans limites, où rien ne pèse : croyances, devoirs, identité, rien à quoi s’accrocher, rien à défendre. Un état où la vague, pour reprendre la vieille métaphore bouddhique, ne se sent plus séparée de l’océan.
L’erreur de beaucoup d’occidentaux, précisément, est de s’attacher à cet état bienheureux, au point d’en faire l’objectif de leur quête, et de culpabiliser lorsqu’ils ne parviennent pas à l’atteindre. Le véritable but de la méditation n’est pas de s’évader ni de cultiver l’hédonisme, une tentation que relève Yves Michaud dans une récente interview au Monde. Le premier but de la méditation est de prendre conscience que tout est lien, relation, et que nous sommes au cœur de cela. D’accueillir tout ce qui est là puis, dans un deuxième temps, nous détacher de toute convoitise. J’ai moi-même partagé cette erreur, jusqu’à cet été, lorsque mon hôte m’a donné à lire Mark Epstein (Pensées sans penseur) et Jack Kornfield (Bouddha, mode d’emploi pour une révolution intérieure). Ces deux psychologues américains explorent chacun à sa manière les convergences entre la science occidentale et la pratique orientale de la méditation. J’y reviendrai.
La poésie, c’est aussi la capacité d’intégrer l’anxiété, la douleur et la laideur inévitables. Avec humour et bienveillance. C’est la beauté des contrastes, régie par d’invisibles contraintes. C’est un jeu, c’est faire comme si. Comme font les enfants. On dirait qu’on serait des pirates, ou des princesses. On irait sur la lune.
La poésie incarnée, c’est Tintin, son enthousiasme juvénile, sa fraîcheur naïve mais toujours motrice, un mouvement porté vers la résolution des intrigues ou des mystères. C’est le professeur Tournesol, soulevé de terre par une boule de feu au milieu d’un désordre indescriptible, dans les Sept boules de cristal. C’est l’audace et la soif de justice. Et ce sont aussi les jurons du capitaine Haddock.
C’est « mille millions de mille sabords » et c’est la ligne claire, obtenue à force d’un travail ambitieux, difficile, qui cherche et parfois trouve une expression plus rare, plus forte et plus précise.
C’est la grâce, l’éternelle jeunesse.
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Tagué Amériques, Colère, Jack Kornfield, langage, Mark Epstein, poésie, Ré, Saint-Clément-des-baleines, sentiment océanique
La colère a mauvaise presse, et c’est bien dommage, car elle recèle à côté des poisons bien connus quelques pépites intéressantes. Tout dépend de la manière dont elle s’exprime, et de la direction qu’elle prend (ou qu’on lui imprime consciemment). Selon Freud : « le premier humain à jeter une insulte plutôt qu’une pierre est le fondateur de la civilisation » .
Un matin, pendant les vacances, mes hôtes entament une conversation sur cette émotion mal famée. La référence, pour moi, c’est le capitaine Haddock, grand maître des tempêtes verbales, gourou ès fureur, pontifex irae, comique involontaire et faire-valoir du lumineux Tintin.
Haddock est connu pour ses éruptions volcaniques résonnant, telles les trompettes d’un Magnificat, à travers l’espace du récit dont il ne cesse de déformer le cours, ou de l’accélérer, transformant en gags les catastrophes qu’il ne cesse de déclencher. Or, ce qui nous enchante, ce n’est pas tant leur intensité que la créativité merveilleusement poétique de ses jurons.
Des amateurs éclairés se sont même chargé de les classer par ordre alphabétique (lien ici : http://fjaunais.free.fr/Tintin/Ihadpres.php)
Il y a quelque chose de jubilatoire dans ce flot toujours renouvelé. Je ne peux pas résister au plaisir de vous en citer ici quelques-uns :
Anacoluthe, invertébré, jus de réglisse !
Boit-sans-soif !
Cercopithèques !
Ectoplasmes !
Forbans !
Gargarismes, gredins, et le délicieux : grenouilles !
Lépidoptères !
Macrocéphales ! Marins d’eau douce ! Mitrailleur à bavette !
Ornithorynque !
Il y a aussi la colère-essorage, violente, mais nécessaire, purificatrice. Celle qui ramène le calme après expulsion des scories et autres émotions troubles. Le colérique-justicier, de type Zorro, qui se met en colère pour une noble cause, invective les fauteurs de torts au comportement égoïste, agressif, manipulateur, inacceptable. Et tant d’autres…
Mais les colères de Haddock ont quelque chose de spécial, de pur et d’enfantin dans leur spontanéité foutraque. Parfois, on sent bien qu’il dérape. Ca déborde de tous les côtés, mais avec une forme de jubilation qu’on lui envie. C’est qu’on aimerait pouvoir, comme lui, se libérer du carcan de la bienséance et dire, une bonne fois, ce qu’on a sur le cœur.
Ainsi la colère n’est pas nécessairement qu’on poison. Elle peut mener à des formes d’action constructives, à condition de la canaliser.
Et la poésie ? (à suivre)
Un peu plus d’un mois après le 11 janvier je relis les notes rapidement capturées dans mon téléphone ce jour-là. Dignité. La France debout. Admirée de l’Europe : fini le french-bashing. Les politiciens qui ont été au niveau des événements. Exceptionnels. Une génération entière, peut-être. Marquée. Mais pour faire quoi? On peut être fiers. A nouveau. De qui? De quoi? D’être mobilisés. De la Marseillaise, qui appartient de nouveau à tous, vibrante au pied de la colonne de la Bastille. Du drapeau qui claque ses couleurs comme des bises. Bleu blanc rouge, est-ce qu’on bouge? On n’avance pas, alors on se regarde, on se parle, on rit non sans gravité. La petite fille au foulard vert blanc rouge de la Tunisie, qui prend son premier cours de manif juchée sur les puissantes épaules de son père. Maquillée comme pour un match de foot, le bonheur. Il lui manque une incisive. Ça repoussera. Un million et demie, qui sont-ils ? Il doit y avoir des employés, des croque-morts, des dentistes. Chacune de de ces vies m’intéresse. Forcément, dans une foule pareille, tous les métiers sont représentés. Des psychologues pour chien. Je suis sûr qu’il y en a un, quelque part entre Bastille et République. Et puis des analystes financiers, des contrôleurs de gestion, des huissiers même, qui font de si gros efforts pour se rendre invisibles (ou sympathiques : la foule lave plus blanc, c’est son principal bénéfice). Avec leurs belles chaussures qui seront si sales ce soir, eux aussi pourront dire : « j’y étais ». Le fils de la coiffeuse portugaise de ma mère aussi. Femme exceptionnelle, empathie puissance XXL à raconter un jour. Tous, aujourd’hui, sauraient chanter la Marseillaise pour « the Voice » et faire se retourner trois coachs. Il ne manque plus que Nabila (« tu vas à la manif et t’as même pas de drapeau? Non mais allô quoi »).
Fier des jeunes qui marchent dans les traces de ceux tombés là, pour la Liberté, en 1830 et de nouveau en 48. Soudain ce n’est plus dérisoire, l’Histoire. On comprend mieux pourquoi Gavroche meurt sur sa barricade. Fiers de tout cela. De la vieille dame qui a tenu à venir, pour sa dernière manif. Ca n’est pas raisonnable, elle s’en fout. Jambes flageolantes, idées carrées. C’est donc cela, concrètement, un peuple? Des policiers vigilants et heureux. Fiers de nous-mêmes qui ne cédons pas à la tentation de haïr. D’avoir retrouvé le sens et le poids des mots. Liberté, Egalité, et brièvement même un peu de Fraternité. Quoi qu’il arrive ensuite, cela aura eu lieu. Quelque chose est posé, un repère. Ensuite, tandis que les politiciens célébraient l’esprit du 11 janvier et que les spécialistes se rengorgeaient comme des pigeons sur les plateaux télé, les français ont glissé dans un état de sidération. Moi compris. On découvre les ombres, toute une frange de ce pays lancée dans un processus de sécession, en banlieue, dans les zones rurales ou péri-urbaines. Combien sont-ils, les décrocheurs de la République? Les journaux publient reportage sur reportage. « La fatwa du slip dans les prisons ». Dans Causeur, un éditorialiste (cousin de l’huissier et du contrôleur de gestion) s’époumone contre Combo, un street artiste dont il a pris la caricature au premier degré. Le ridicule et l’abjection grignotent à nouveau l’espace médiatique. On avait failli respirer plus large, on s’était crus nombreux à préférer la bienveillance.
Et puis ce week-end, à nouveau, un jeune raté de la société du spectacle, comme l’a finement analysé Peter Sloterdyjk dans le Monde. La petite sirène pleure à Copenhague, au Danemark, le pays du bonheur convivial.
Comment parler de tout cela en coach ? Sans se dérober ? Pour soi, pour la dignité. Pour la génération qui grandit dans cette société-là.
La France est un grand pays solide, le Danemark un petit pays fier de sa société partageuse et de son environnement. Les deux sont frappés, en ce début d’année, mais on se retiendra d’écrire après Shakespeare qu’ « il y a quelque chose de pourri au royaume de Danemark » (ou dans la république française). S’il y a une leçon à retenir de tout cela, justement, c’est de prendre son temps. Penser, ce n’est pas appuyer sur sa tête comme sur un tube de mayonnaise pour en faire sortir l’opinion. Cela, c’est l’activité des commentateurs. Penser, c’est un travail. Penser comment vivre ensemble. Certains disent que c’est le travail d’une génération. Mais réapprendre cela n’est-ce pas la plus noble des tâches ? Osons le mot, il revient à notre temps de réinventer l’intelligence collective, sans arrogance, et de faire place aux émotions, quelles qu’elles soient. On pourrait entreprendre un inventaire de tout ce qui nous rend collectivement fiers aujourd’hui, à commencer par notre originalité gouailleuse de bonne foule mi-caille mi-canaille. Car l’humour, c’est comme les incisives cassées dans la bouche des petites filles : ça repousse toujours et ça devient plus mordant.
Et pour finir en lumière, un poème du bloguer Francis Royo, à lire sur Analogos : (http://analogos.org/)
sur mon pouce ébloui un soleil a dansé
petite éternité de lumière
impatiente main d’homme
A suivre.
Dimanche 11 janvier 2015, 10h30 du matin.
Il se passe en ce moment dans notre pays quelque chose d’historique, comme il en arrive seulement une ou deux fois par siècle. Vous vous demandez sans doute, comme tout le monde, quel sens donner à ces événements tragiques qui nous ont secoués si profondément. Je pense beaucoup à vous, où que vous soyez, et je me souviens combien c’est difficile de vivre de tels moments quand on est loin. Je me souviens de 2005, lorsque je voyais mon pays brûler au loin, depuis mon écran de télé, à Manille. Dans ces moments, il faut résister à la colère et chercher quelque chose de plus profond en soi, quelque chose qui nous rassemble et qui permet de vivre ensemble.
Tout à l’heure, comme des centaines de milliers, peut-être un million de français, avec leurs amis venus de tous les pays, j’irai marcher. Je ne marcherai pas contre, mais POUR. Pour la liberté d’expression, pour la fraternité, pour donner un sens à ce moment d’unité dans la diversité. Je marcherai pour poser des limites à la haine, à la violence, à l’intolérance et à toutes les discriminations. Sur France Info, la philosophe Cynthia Fleury vient de dire que nous assistons au premier événement, historique, de la France mondialisée. Nous assistons à la naissance de la Génération Charlie. Ce que signifie cette expression n’est pas encore écrit : ce sens, il nous appartient de le construire. Ce monde qui vient, c’est celui dans lequel vous habiterez, vous et vos enfants. Il se construit sur nos actes et sur nos choix, mais aussi sur nos absences d’actes et nos absences de choix. Vous le continuerez lorsque nous ne serons plus là. C’est une responsabilité que nous partageons. Quelle sera la place de la liberté, dans ce monde qui vient ? Quelle place pour la diversité ? Est-ce que chacun pourra vivre comme il l’entend, à sa manière, dans le respect des autres ?
Il y a du travail, ça ne se fera pas tout seul. Ainsi cet extrait d’un témoignage de mon amie C.M, que je publierai en entier demain ici-même : « Connaître l’autre, partager sa culture et la nôtre, éduquer les enfants à la tolérance, donner une chance aux plus pauvres, fabriquer de la justice sociale et de la justice tout court. Mais tout autant, condamner et sanctionner sans restriction tous ceux qui font leur beurre de la radicalisation, du retour aux heures les plus sombres de l’obscurantisme en fanatisant sans peine les plus faibles. »
Ces derniers jours, la presse a publié le témoignage de professeurs qui racontaient les difficultés qu’ils éprouvaient à parler des événements tragiques de ces derniers jours avec leurs élèves. Ces élèves, il faut les entendre avec respect, avec plus que jamais le sens de la fraternité. Il faut les amener dans la conversation générale, et construire avec eux, sans chercher à leur imposer tel ou tel point de vue. On parlera beaucoup de laïcité dans la presse. La laïcité, cela ne signifie pas d’interdire toutes les croyances, mais de les permettre toutes. On doit pouvoir parler de tout, sans peur, et je vous y encourage. J’étais à l’île Maurice au mois d’août, ils y arrivent très bien. Pourquoi pas nous ?
Nous avons la chance de former une belle famille, aimante et diverse, une famille dans laquelle chacune et chacun trouve sa place. Des catholiques, des musulmans, des athées, une bouddhiste, un spiritualiste …bon, ça manque de juifs, mais il reste une place, au bout de la table. On est taquins, malicieux, on ne s’épargne pas, mais on s’aime et on n’a pas peur de se le dire. Je suis fier de notre famille, et j’aimerais aujourd’hui que la France nous ressemble un peu.
Ajouté dimanche soir : oui, la France nous ressemble, et nous lui ressemblons, et j’en suis infiniment heureux. Cette marche était tellement pacifique, et drôle, et grave en même temps. On a beaucoup ri, d’un rire bienveillant. Beaucoup de questions demeurent ouvertes. Nous allons devons réfléchir, discuter, confronter nos points de vue pour construire des réponses acceptables et vivables. Le courage, maintenant, ce sera d’aller vers l’Autre, et vers l’Autre en nous.
Et, tiens, pour finir sur une note d’humour, je mets ici un lien vers le message de l’humoriste Sonia Orosamane à « tous les cinglés, jhadistes, pianistes, cyclistes… ici : » https://www.google.fr/webhp?sourceid=chrome-instant&rlz=1C1CHVN_frFR517FR517&ion=1&espv=2&ie=UTF-8#q=samia%20grosemane
Une histoire que raconte Emmanuel Carrère, dans le Royaume :
C’est une maîtresse de maison qui reçoit à dîner. Elle a posé une superbe entrecôte de cinq livres sur le buffet de la cuisine. Les invités arrivent, elle bavarde avec eux dans le salon, on boit quelques martinis, puis elle s’excuse, file dans la cuisine pour préparer l’entrecôte… et s’aperçoit qu’elle a disparu. Qui voit-elle alors dans un coin, en train de se pourlécher tranquillement les babines? le chat de la maison.
– Je devine ce qui s’est passé, dit la plus grande des filles.
– Oui? Que s’est-il passé?
– Le chat a mangé l’entrecôte.
– Tu crois ça? Tu n’es pas bête, mais attends…Les invités accourent. Ils discutent. les cinq livres d’entrecôte se sont volatilisés, le chat a l’air parfaitement satisfait et repu. Tout le monde en conclut la même chose que toi. Un invité suggère : et si on pesait le chat, pour en voir le coeur net? Ils ont tous un peu bu, l’idée leur paraît excellente. Ils emportent le chat dans la salle de bains, le mettent sur la bascule. Il pèse exactement cinq livres. l’invité qui a suggéré de peser le chat dit : c’est bien ça, le compte y est. On est certains maintenant de savoir ce qui s’est passé. C’est alors qu’un autre invité se gratte la tête et dit : d’accord, on voit bien où elles sont, les cinq livres d’entrecôte. Mais alors, où est le chat?
Et pour déguster l’humour croisé d’Emmanuel Carrère et de Jean Echenoz, c’est ici.
Dans nos vies secrètes
Nos vies secrètes ne se racontent pas sur facebook, ne s’enregistrent pas sur FourSquare. Elles ne sont pas géolocalisées. Google ne sait rien d’elles. Nos vies secrètes sont assez drôles, mais irracontables. « Dans ma vie secrète », chante Léonard Cohen (ici), « Je souris quand je suis en colère, je triche et je mens, je fais ce que je peux, je me débrouille, mais je n’oublie jamais la frontière qui sépare le bien du mal, et j’ai soif de vérité. »
Dans nos vies secrètes, on avance à l’instinct, dans l’incertitude et l’ambiguïté. Rien n’est clair ni gagné d’avance, il faut faire avec ce mur de brouillard, décider, risquer, choisir sa route. Il nous arrive souvent de nous tromper, de regretter, puis on avance. « Le Dealer veut nous faire croire que dans la vie c’est tout noir ou tout blanc, mais heureusement ce n’est pas aussi simple, dans ma vie secrète », chante ce vieux bandit de Léonard.
Elles sont lestées de jours amers, d’échecs, de renoncements sans gloire, nos vies secrètes, ce sont des murs d’ombre au long desquels nous glissons, furtifs, animés d’un étrange espoir. Mais pas toujours. Dans nos vies secrètes, nous faisons parfois des rencontres inespérées, de noirs miracles se produisent, et de nos plus graves erreurs naissent parfois des merveilles.
Nous avons, dans ces vies secrètes, des fréquentations inavouables avec des êtres imaginaires, et d’autres bien trop réels. Nous sommes libres d’inventer, d’oser sans craindre la critique ou l’incompétence, et nos limites s’effacent, dans nos vies secrètes. L’échec n’est qu’un dé parti de travers, prêt pour un nouveau tirage, une erreur à corriger. Tout est jeu, dans nos vies secrètes. Ce sont des trésors d’enfants, cachés tout au fond des armoires.
Ce sont des programmes déviés par des armées de hackers sans scrupules, agressifs et joyeux.
Nos vies secrètes se faufilent dans les interstices du contrôle social et du politiquement correct. Ce sont des virus transformés en œuvre d’art à l’ère de leur reproductibilité par des artistes inconnus, clandestins, hors cote.
Nos vies secrètes se moquent des quarantaines, des calories, des manger-bouger, mais comme Léonard nous savons toujours tracer la frontière qui sépare la bienveillance de la cruauté, la compassion de l’indifférence, le profane du profit. Nos vies secrètes se tissent, jour après jour, d’heure en heure, enrichies de contradictions. Elles se déroulent sans logique et sans cohérence, et s’autodétruisent après la jouissance. Elles s’écrivent en graphes discontinus, à l’encre invisible et fort sympathique.
Perdues pour les algorithmes, elles ne rapportent rien à personne. Elles ne sont pas échangeables, n’ayant ni valeur, ni contre-valeur.
Nos vies secrètes ne sont même pas des vies, d’ailleurs ceci n’est pas un texte, et vous n’avez rien lu.
Publié dans Ecriture, Humour, Musique, résilience
Tagué Léonard-Cohen, reproductibilité, vies-secrètes, Walter-Benjamin
Rentrée tout en rondeur et de bonne humeur, sous prétexte d’aller tester des procédures de crise au bord de l’océan indien. Maurice, Madagascar : quand le travail stimule au lieu de fatiguer. Jusqu’à l’arrivée d’un nuage de criquets, qui nous précipite aux fenêtres avec des cris d’enfants, l’ambiance est vibrante et productive comme celle d’une ruche. Lorsqu’on atteint sans effort un haut degré de concentration, que les actions s’enchaînent avec naturel et fluidité, lorsque la plus grande rigueur n’exclut pas les fou-rires et que la discipline d’une équipe entière évoque le sport plus que le militaire, on sait que l’on vit un moment de « flow » décrit par Mihaly dans « Vivre », l’un des livres fondateurs de la psychologie du bonheur.
Et c’est un bonheur aussi de vivre cela si loin de chez soi, parmi des gens issus de cultures si différentes, mais qui s’harmonisent entre elles avec la suavité des consonnes et des voyelles adoucies dans l’accent créole. Ici, l’intelligence collective se respire parmi les parfums de vanille et les brises marines.
Créole aussi l’humour si particulier, léger, moqueur avec bienveillance, l’humour des îles.
J’en veux pour témoignage ce « Tintin à Madagascar »,(lien ici) fausse couverture servant de décor aux boîtes de marqueterie vendues à l’aéroport. Délicieusement parodique, l’objet remise au musée de la ringardise le « Tintin au Congo » de honteuse mémoire. Au mépris colonial répond la subtilité, doublée d’un savoir-faire artisanal exceptionnel.
Les malgaches que j’ai rencontrés ne se croient pas obligés de tordre les commissures des lèvres d’un air sinistre pour paraître professionnels, puisqu’ils le sont. J’aimerais tant que la Banque Mondiale et le FIM s’en aperçoivent pendant qu’il est temps de stabiliser un pays qui se relève à peine d’une période agitée.
Comme Tintin, personnage aux deux visages, l’un noble et solidaire, l’autre ignoble et donneur de leçons, choisissons celui que nous voulons incarner. Mais choisissons vite.
A propos de ruches, coup de cœur sur un sujet qui n’a rien à voir : c’est la saison du miel. Bonjour à mon ami Jérôme Veil, happy-culteur et fondateur de « Miel de quartier » (lien ici).
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Allez, je m’en doute bien qu’elle ne vous dit rien qui vaille, cette rentrée qui se faufile, doucereuse, hypocrite, sur la queue d’un été finissant avant même d’avoir commencé. Vous vous sentez floués, grugés par les promesses de dopamine et d’azur non tenues, ou trop légères pour véritablement tenir au corps. Ce sont des bénéfices trop vite évaporés, de trop menus plaisirs menaçant de tourner à l’aigre. Et pourtant, cette rentrée, à moi, elle me donne une faim d’ogre.
Par esprit de contradiction, bien sûr, mais pas seulement.
J’ai pour ma part de très belles raisons de chérir le mois de septembre. Dans la lumière dorée du Luxembourg, où passe parfois l’éclair d’un écureuil, j’ai caché des graines de souvenirs. Je les cultive en jardinier gourmand, sans une once de nostalgie. Plus loin, la rue Vavin remonte vers le boulevard Montparnasse où de modernes alchimistes s’entrainent à reprogrammer le vieux plomb, pour en faire de l’or. La formule est connue : corps, langage, mémoire. Car nous avons de l’or entre les mains, des roses fraîches dans le cœur, aux lèvres un goût d’épices. J’aime aussi l’air frais des matins vivaces : il y a parfois dans ces arrière-saisons des recommencements qui flamboient, de glorieux hasards, des surprises à l’éclat de diamant. Mais ce sont des diamants qu’il faut tailler pour qu’ils brillent, ils ne sont pas donnés. Ces étincelles qui se rallument avec l’ardeur d’une seconde chance, il faut en saisir la magie, tout de suite, et s’accrocher. Sachons allumer ces mèches prometteuses. Ne craignons pas de dynamiter la morosité qui s’installe : ce n’est jamais qu’un nouveau conformisme, à retourner comme un vieux gant. Soyons le départ du fou-rire dans une assemblée de notaires.
Pour aujourd’hui, je n’en dirai pas plus.
PS : ne ratez pas la série que publie en ce moment le Monde sur Plonk et Replonk, les graphistes suisses à l’humour délicieusement loufoque (lien ici). Ils détournent des images quasi-vraies, ou les recomposent pour créer des bijoux hilarants. Parmi leurs carte postales décapantes : « le percement de l’arc de Triomphe » ou la « famille de cosmonautes » (lien ici) qui prennent la pose, en scaphandres ajustés à leur taille et à leurs costumes 1900. Il ne tient qu’à nous d faire, de chaque instant, une Belle Epoque.
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Sur la chaîne de l’AFPA, une interview de Stefan Vanistendael sur la résilience.
La définition qu’il en donne va bien plus loin que la résistance aux chocs : il s’agit pour un individu, une famille, une société entière, de la capacité à mobiliser toutes les ressources dont elle a besoin pour résister au stress, au changement, à l’usure. D’une voix douce et sans jargon, Stefan Vanistendael expose des idées fortes et partage son expérience sans jamais prendre une position d’expertise, mais plutôt de partage. Dans un autre article, sous le titre : « la résilience, le regard qui fait vivre« , il évoque, à propos du film Billy Eliott, « le regard d’une femme qui fait son métier, dans un contexte banal, mais qui ne recule pas devant ce qu’elle voit, qu’il s’agisse d’un manque de liberté ou d’un potentiel caché ». Cette femme décidera de donner sa chance à Billy. La chance d’accomplir son rêve. Réfutant tout déterminisme et tout fatalisme, Stefan Vanistendael nous explique que la capacité de se reconstruire dépend de deux choses fondamentales : le lien, et le sens.
Le lien, ou le regard que nous portons les uns sur les autres. L’attention.
Il se passe quelque chose d’intéressant dans la société française. Depuis quelque temps, on voit se multiplier des actes de micro-solidarité, dans le métro, dans la vie de tous les jours. Parfois c’est juste un sourire complice, une porte que l’on retient, le coup de fil d’un ami, le sms qui tombe à pic, empreint de bienveillance. Autant de petits gestes attentifs qui ne sauveront pas la planète mais qui, à chaque minute, nous sauvent collectivement et individuellement du désespoir.
J’en profite pour proposer un deuxième coup de coeur à l’association Passerelles et Compétences, qui met en relation des associations ou des ONG et des bénévoles qui ont du temps et du savoir-faire à donner. Le passage à l’action, lorsqu’elle est tournée vers les autres et qu’elle valorise les compétences, représente l’une des thérapies les plus efficaces.
En bonus et clin d’œil, parce que l’humour est aussi l’une des clés de la résilience, une pub vue dans le métro et qui n’a rien à voir avec le sujet (Merce Cunningham : la danse et la musique n’ont rien à voir l’une avec l’autre, elles ont juste lieu au même moment, au même endroit), quoique…
And so I am back in the Philippines, surrounded by familiar and unfamilar faces. It starts in Abu Dhabi airport, as hundreds of Filipinos working in the Middle-East, otherwise known as Overseas Foreign Workers (OFWs), prepare to board the plane. A unique ambience, made of excitement and nostalgia, as the accumulated pain and repressed fears comes closer to the surface. Some of these people have not been home for years. They long to see their relatives, to feel home again, and safe. That feeling is so palpable and moving, even a foreigner like me gets the goose bumps.
Then in Manila, the pervasive sound of laughter bubbles up around me, in malls, in elevators, in meeting rooms, in the street. People keep laughing all the time, about anything, and this is so refreshing. Its a question of attitude, a way of looking at life.
My French friends find it hard to believe I am actually here for work, but how can I ever explain how much work here can at the same time be pleasure? French companies based here know about this unique mix of professionalism and joie de vivre, as can be seen on their facebook page. Go for pink and apple green, ye super-accountants, engineers, managers!
When you are really good at what you do, and you work so hard, you can afford to go a little crazy from time to time.
And of course the culinary trip to pampanga with a bunch of ladies and art-buffs, the Beti church, Art-Nouveaux houses lost in the middle of dusty villages and the splendid swamps where birds come from all over Asia. As always the best stories come at sunset, like the great-grand mother who would be taken out of her grave by the villagers once a year for all saint’s day and exposed for a couple of days until she was authorized to go back rotting undergrouond. Now I understand better the crazyness of certain Filipino movies.
And by the way, who murdered the cute little turn-of-the Century koleyiala?
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Tagué joie de vivre, Manille, OFWs, Pampanga, Philippines