Corps langage mémoire de Cunningham a Casilli


La musique d’Oceans a beaucoup vieilli, tandis que la chorégraphie de Merce Cunningham demeure hypermoderne et fluide en dépit du montage de Charles Atlas. Qu’importe si le rythme haché des images maltraite les mouvements des interprètes et martyrise les yeux, il fallait y être (en être ?) et savourer ce privilège entre connaisseurs. Les lumières somptueuses valorisent l’orange et le pourpre des justaucorps, l’abstraite virtuosité des gestes. On respire dans une bulle à l’image d’un futur où le corps humain ne sera plus qu’une trace, un support. Cela fait froid dans le dos comme toutes les prédictions du mouvement transhumaniste. Prochaine étape : la déterritorialisation totale du corps, transféré dans des univers virtuels d’où sera bannie toute imperfection, où l’émotion sera dévalorisée comme niaiserie facteur de désordre. Plus rien ne s’opposera dès lors à la transformation en marchandise de ce résidu d’où toute notion d’humanité aura été évacuée. On pourra voter toutes les lois que l’on voudra sur la bioéthique, une fois le mouvement lancé, rien ne l’arrêtera. Voir à ce sujet Time Out, le film d’Andrew Niccol avec Justin Timberlake et Amanda Seyfried.

Fantasme ? Oui, mais fantasme dangereux car bénéficiant de tout un courant de pensée soutenu par des financements illimités.

Il n’y a pourtant pas de fatalité. D’autres futurs sont possibles, comme en témoigne le livre d’Antonio Casilli « les liaisons numériques » (Seuil). Nourrie de témoignages de bloggers, d’artistes, d’adeptes des nouvelles pratiques sexuelles ou sociales en ligne, la réflexion d’Antonio Casilli montre que la capacité d’imagination de l’être humain demeure sans limites.

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