Ce monde qui vient (légendes photographiques)
Ce monde qui vient aura des dieux étranges qu’il faudra déchiffrer
Des silences provocants
Et beaucoup trop de tout
Ce monde qui vient nous met la fièvre
J’aime à rêver qu’elle suit parfois le parcours de la Bièvre
Et coule, en s’apaisant
Ce monde qui vient rendra nos pas glissants
Ce monde qui vient progressera sans oracles
Il aura ses processus et ses protocoles
Ses Bonaparte et quelques montres molles
Des talents d’organisateur
Et ce qu’il faut pour se faire peur
Ce monde qui vient sera toxique, aride, et révoltant
L’argent coulera dans ses veines souterraines
Il aimera le sexe et la mort
La célébrité, le pouvoir, le sport
Il aura ses Beckham, ses ManU, ses caciques
Des cartels venus du Mexique
Ce monde aura de vraies délicatesses
Des sourires à tordre la foule
Ce monde aura le cœur métis
Il aura perdu le goût du réglisse
Et la jouissance dégingandée
Des pavés
Ce monde qui vient sera loufoque
Désolant, rauque et craquant de tendresses froissées
Veloutées au toucher comme des feuilles jaunies
Tu te souviendras des automnes
Avec nostalgie
Mon amour, et des allées du Luxembourg
Ce monde qui vient se paiera notre pomme
Acidulé de couleurs pop
Il nous refilera ses divas, ses drones
Il fera de nous des pantins
Des Tintins, des filous
Des monstres hybrides à la tête de clou
Ce monde qui vient sera lisse comme la glace
On s’y lancera de toutes nos forces avec la ferveur des hollandais
Sur leurs canaux
Ce monde qui vient sera brutal
Comme tous ceux qui l’ont précédé
Parfois, la peur sera tenace
Ce monde qui vient pétillera d’Agiles et de SCRUMS
Et puis de poésie
Quand les soldats de pacotille
Mimeront des floraisons d’idées
Quel printemps ce sera
Tu verras !
Ce monde aura, s’il vient
Toujours de quoi se démaquiller
Les doigts des femmes danseront comme des oiseaux devant leur visage
On aura des soins sans beauté
Des velléités d’esclavage
Et des chorégraphies bleutées
Nos impulsions seront tactiles et les fleurs digitales
On s’achètera de nouvelles vies
Ce sera de la balle
Tout ira plus vite
Sauf les frites
On n’aura plus ces yeux de braise
Qui vous meulaient le regard comme des fraises
Il n’y aura plus de sidérurgie
On connaîtra tout de la plasturgie
Tout sera minimal, idéal, sidéral
Souvent banal
On ne sera plus jamais vraiment ivres
La chair ne sera jamais triste
On ne lira plus tous les livres
Mais on s’en fout, puisqu’on, c’est nous