Une dernière fois, respirer l’odeur des noisetiers après l’orage. Pincement de nostalgie à la veille du départ. Plonger dans l’action, fenêtres à fermer, valises …
L’été règne encore dans toute sa plénitude. La lumière change de minute en minute, au gré des nuages qui développent des architectures obliques dans le ciel éclairé comme un tableau de l’âge d’or hollandais. Feuillages roux-verts sur fond d’un bleu céruléen que trouble un rare corbeau. Une horloge éloignée tinte au clocher du village. Le vent caresse les branchages comme des doigts dans une chevelure aimée. La douceur de l’air a quelque chose d’éternel.
Dans ma tête la chanson doucereuse de Laurent Voulzy : « derniers baisers». On sait qu’on a réussi ses vacances à cette émotion qui nous saisit au moment de partir. Mais il y a quelque chose de plus. Un sentiment d’amour pour ce paysage, pour ce pays que nous envient tant de peuples, et pour lequel il n’était guère couru de professer son attachement il y a encore quelques années. Bien sûr, l’identité de la France ne se réduit pas à cette idylle bucolique. Elle est ancrée dans sa langue, où palpite son âme, dans son histoire, ses valeurs, le talent de ses artistes et de tous ceux qui l’ont fécondée de leur travail et de leur génie, mais le paysage est comme le corps d’un pays : support sensoriel de la mémoire, incarnation, réalité tangible. On aime ce que l’on peut toucher, goûter, voir, entendre. Il faut avoir vécu loin de son pays, de ses saisons, de sa lumière si particulière, il faut être parti et revenu pour éprouver ce mélange de tendresse et de gratitude.
La tentation de rester quelques heures, quelques jours de plus naît du calme profond, nourrissant, reposant de ce petit coin de Sarthe. Nous sommes dans un lieu paisible, à l’écart des controverses et de l’agressivité que l’on sait devoir retrouver bientôt, bien trop vite. Mais ce n’est pas cela qui m’inquiète. La confrontation des opinions, des ambitions et même des ego fait partie de la vie. Retrouver la ville et le travail, c’est replonger dans cette ambiance à la fois productive et stimulante.
En revanche, l’ambiance désenchantée de cette rentrée teintée de résignation, voilà ce à quoi je ne peux me résoudre. Les échanges que j’ai pu lire ici et là sur les réseaux sociaux témoignent tous d’un repli sur soi qui peut refléter simplement le bonheur domestique, mais aussi le désengagement de la vie en commun. Ce que j’aimerais entendre, dans ce contexte, serait la fameuse tirade du « non merci » de Cyrano de Bergerac (lien, version Rappeneau-Depardieu). Voilà dans quoi nous pourrions mettre énergie, talent, goût du risque aujourd’hui. Refusons la médiocrité, la démission, le désespoir. Attaquons cette rentrée avec l’envie de créer quelque chose, de faire une différence. Aimons plus large.
Merci !
Merci pour ce commentaire bien senti et positivant une rentrée à reculons !
Merci à toi !
M