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le capitalisme appliqué aux Beaux-Arts


L’art et la spéculation font bon ménage, et depuis plus longtemps qu’on ne le croyait.

Une page entière dans le Monde, on se dit : wow, le sujet doit être important. En effet, il ne s’agit de rien moins que de l’expo Léon Gérôme au musée d’Orsay. Léon Gérôme, ce loser historique qui s’opposa becs et ongles aux expressionnistes au nom d’une peinture lisse, bien faite, léchée, objet de mépris durant tout le XXème siècle? N’y a t-il donc rien de plus intéressant à commenter dans l’actualité artistique du jour? C’est qu’une pleine page dans le Monde, toute attachée de presse qui connaît son métier (ou quiconque a survolé le dernier Houellebecq) vous le dira, ç’est du lourd!

Lisons donc. Philippe Dagen, relais d’opinion de première classe  autorisé à penser à notre place, nous explique doctement que Léon Gérôme, c’est le capitalisme appliqué aux Beaux-Arts. Ah, on comprend mieux. Qu’importent les qualités artistiques de la peinture, cela n’entre plus du tout en ligne de compte. Selon le même raisonnement qui avait permis à Dagen d’affirmer qu’Andy Warhol était sans doute plus important que Picasso pour l’histoire de l’art, ce qui compte, ce qui vaut à la marque L.G ce retour en grâce, c’est d’avoir avant tout le monde su tirer profit de l’effet de levier qu’offraient les moyens de reproduction photographiques de masse,  alliés à un sens du positionnement et du scandale médiatique hors pair.

Si le mérite principal d’un artiste est de savoir utiliser à bon escient les règles du capitalisme, alors, le raisonnement se tient tout à fait. Léon Gérôme, c’est le Jeff Koons du XIXème siècle. Et vice-versa, naturellement.

PS : la reproduction de billets de banque étant répréhensible aux yeux de la loi, il n’y aura pas d’illustration pour cet article mais vous pouvez toujours rêver le concept.

Extension du territoire de la rouille


Dessiner, c’est créer du territoire, un pays imaginaire sur la feuille blanche.

En hommage à mon commentateur le plus dévoué et à son fils, ce vieux panneau couvert de rouille à l’entrée d’un  territoire dont nous aurons largement fait le tour en parole, en vélo, puis dans le souvenir où il s’échappe.

Je remets le lien sur le territoire et la dé-territorialisation posté par Thibaud dans son commentaire sur le re-paysement, car dessiner, c’est créer du territoire, un pays imaginaire sur la feuille blanche.

Extrait : « dans Mille Plateaux, Deleuze et Guattari utilisent l’exemple de la main de l’homme pour décrire ce processus, et nous amène du coup à une définition profondément teinté par une pensée de la technique:

Chez les animaux nous savons l’importance de ces activités qui consistent à former des territoires, à les abandonner ou à en sortir, et même à refaire territoire sur quelque chose d’une autre nature (l’éthologue dit que le partenaire ou l’ami d’un animal « vaut un chez soi », ou que la famille est un « territoire mobile »). A plus forte raison l’hominien : dès son acte de naissance, il déterritorialise sa patte antérieure, il l’arrache à la terre pour en faire une main, et la reterritorialise sur des branches et des outils. Un bâton à son tour est une branche déterritorialisée. Il faut voir comme chacun, à tout âge, dans les plus petites choses comme dans les plus grandes épreuves, se cherche un territoire, supporte ou mène des déterritorialisations, et se reterritorialise presque sur n’importe quoi, souvenir, fétiche, ou rêve. […] On ne peut même pas dire ce qui est premier, et tout territoire suppose peut-être un déterritorialisation préalable; ou bien tout est en même temps. »— Gilles Deleuze, Felix Guattari ; Qu’est-ce que la philosophie ?; pp.66

Et plus loin, le commentateur poursuit :

« Le capitalisme « déterritorialise » pour mieux générer des flux de capital. Il ne déterritorialise pas comme d’un acte créatrice, voire artistique, ou pour une quelconque idéologie d’un monde meilleur. Car, comme nous avons déjà dit, le déterritorialisation est d’habitude un mouvement créatif, voire un mouvement essentiel dans le flux essentiel du renouvellement de la « Nature », ou de la vie. Au contraire, le capitalisme déterritorialise pour mieux assurer des flux de capital, c’est son prérogative. L’axiomatique de ce point de vue permet de remplacer le l’objet, le mœurs ou le processus territorialisé par un autre « d’un même valeur » et ainsi le faire rentrer dans l’économie marchande généralisée. »

Sinon, je ne crois pas qu’on parle des Roms dans le numéro de septembre de Côté Ouest, qui vient de sortir.