Archives de Tag: Roms

les bisous de la Castafiore


Ma nièce (la petite) : « moi aussi je veux un bisou de la Castafiore« .

Et tiens, j’en remets un coup à propos des Roms. Qu’est-ce que c’est que cette façon de stigmatiser les « “très grosses cylindrées [qui] tire[nt] des caravanes” »? Que fait le syndicat du camping-caravaning? Au créneau les gars!

Lançons un concours de slogans, genre :
– « à cinquante ans, si t’as pas une caravane, t’as raté ta vie »

Lundi 16 : tous des Roms


Mail inattendu de l’administrateur du haplo group R1B1 (Genographic project) : la lignée paternelle serait originaire d’un petit groupe d’individus fuyant l’Europe centrale où sévissait la peste bubonique au quatorzième siècle. Le fait que cette version contredise la légende familiale la rend des plus intéressantes.  On n’est plus bretons depuis 1035, alors ? Quelque chose ne tourne pas rond ? Suspense et suspicion ! Ma génération n’aurait donc pas inventé le métissage ? Quel hongrois vint, dans la nuit médiévale, greffer ses gènes sur l’ancienne souche bretonne ? « Génétique en bandoulière », chantait Noir Désir. Possibilité d’un scénario. Famille, tes mystères à l’heure des séries!

Le rire éraillé de Margot résonne dans la  nuit sarthoise, grave-aigu-médium étiré, les poumons dilatés, ravie de son effet. C’était donc ça la bombinette, le mail annoncé en gare de la Rochelle? On se croit tranquille comme un âne du Poitou broutant son pré salé depuis des générations et l’on se découvre mouette, migrant-migrateur, mobile, nomade, un tapis volant sous les pieds, zoup-là ! Sur quelles routes narratives cherche t-elle donc à m’attirer ? L’Europe est si vaste, et l’histoire de ses populations si compliquée. Je me connecte sur le site du Genographic project où de sinistres flèches rouges retracent la progression de la Peste Noire au 15ème siècle. Terrifiante hypothèse… Mes ancêtres auraient-ils apporté le virus dans leurs bagages ? Un européen sur trois succomba à l’épidémie. Me reviennent en mémoire les peurs ressurgies en Asie lors de l’épidémie de SRAS, le journaliste qui faillit être lynché dans un petit village aux Philippines parce qu’il revenait d’une province où se trouvait une personne contaminée, l’ostracisme dont la population de Singapour avait frappé les infirmières philippines, les seules qui voulaient encore bien s’occuper de leurs malades. On croit toujours que la peste, c’est l’autre, alors qu’on la porte en soi depuis des siècles.

Plus j’en apprends sur l’histoire des migrations humaines, plus je suis fasciné par ces multiples croisements, ces routes anciennes qui nous ramènent par mille détours à l’origine commune, à l’unité de l’espèce humaine. Pendant ce temps-là, le gouvernement de la France met en scène l’expulsion des Roms. On se croirait revenus au temps de Philippe le bel lançant la chasse aux juifs. C’est donc cela, le retour au moyen âge annoncé par Nicolas ? Il faudrait leur envoyer un exemplaire des Bijoux de la Castafiore, où l’on voit Tintin prendre la défense de ces boucs émissaires. Tout ceci devient nauséabond, relents des années trente. Allons-bon, je vais me faire traiter de millionnaire germanopratin. (Si seulement). Ce n’est pas cette France-là que je suis venu retrouver après de longues années en Asie. A quel âge mon neveu métis subira t-il son premier contrôle au faciès ? Comment l’armer contre cette inéluctable agression ? Comment lui faire aimer la France ? Marianne, reviens, ils sont devenus fous !

 

Reviens Marianne, ils sont devenus fous!

 

Extension du territoire de la rouille


Dessiner, c’est créer du territoire, un pays imaginaire sur la feuille blanche.

En hommage à mon commentateur le plus dévoué et à son fils, ce vieux panneau couvert de rouille à l’entrée d’un  territoire dont nous aurons largement fait le tour en parole, en vélo, puis dans le souvenir où il s’échappe.

Je remets le lien sur le territoire et la dé-territorialisation posté par Thibaud dans son commentaire sur le re-paysement, car dessiner, c’est créer du territoire, un pays imaginaire sur la feuille blanche.

Extrait : « dans Mille Plateaux, Deleuze et Guattari utilisent l’exemple de la main de l’homme pour décrire ce processus, et nous amène du coup à une définition profondément teinté par une pensée de la technique:

Chez les animaux nous savons l’importance de ces activités qui consistent à former des territoires, à les abandonner ou à en sortir, et même à refaire territoire sur quelque chose d’une autre nature (l’éthologue dit que le partenaire ou l’ami d’un animal « vaut un chez soi », ou que la famille est un « territoire mobile »). A plus forte raison l’hominien : dès son acte de naissance, il déterritorialise sa patte antérieure, il l’arrache à la terre pour en faire une main, et la reterritorialise sur des branches et des outils. Un bâton à son tour est une branche déterritorialisée. Il faut voir comme chacun, à tout âge, dans les plus petites choses comme dans les plus grandes épreuves, se cherche un territoire, supporte ou mène des déterritorialisations, et se reterritorialise presque sur n’importe quoi, souvenir, fétiche, ou rêve. […] On ne peut même pas dire ce qui est premier, et tout territoire suppose peut-être un déterritorialisation préalable; ou bien tout est en même temps. »— Gilles Deleuze, Felix Guattari ; Qu’est-ce que la philosophie ?; pp.66

Et plus loin, le commentateur poursuit :

« Le capitalisme « déterritorialise » pour mieux générer des flux de capital. Il ne déterritorialise pas comme d’un acte créatrice, voire artistique, ou pour une quelconque idéologie d’un monde meilleur. Car, comme nous avons déjà dit, le déterritorialisation est d’habitude un mouvement créatif, voire un mouvement essentiel dans le flux essentiel du renouvellement de la « Nature », ou de la vie. Au contraire, le capitalisme déterritorialise pour mieux assurer des flux de capital, c’est son prérogative. L’axiomatique de ce point de vue permet de remplacer le l’objet, le mœurs ou le processus territorialisé par un autre « d’un même valeur » et ainsi le faire rentrer dans l’économie marchande généralisée. »

Sinon, je ne crois pas qu’on parle des Roms dans le numéro de septembre de Côté Ouest, qui vient de sortir.