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Liberté sans mesure


J’ai tellement aimé ce billet de mon ami JB Plantin (voir son blog : le petit JB le petit JB) que je le reproduis ici intégralement :

« Je n’indique plus combien je nage. Je n’indique plus combien je cours. Plus de runtastic, plus de musique branchée dans les oreilles. On passe notre temps à se mesurer : le temps, les calories, la vitesse – de pointe, en moyenne, le dénivelé…Etc. On s’enregistre, on se moyennise, on s’histographe.

On doit mesurer et exposer nos performances. Il nous faut optimiser le temps qu’il ne faut pas perdre et se lancer des défis à soi-même qu’on s’empresse de partager avec les autres. Il faut être efficace. Efficient. Je me chronomètre, donc je suis. Je me rythme au son de la musique. Quel glissement et quel perte de sens depuis le « connais toi toi-même » de Socrate, en passant par le « je pense donc je suis » de Descartes.

Finalement, je me suis rendu compte qu’on se perdait. On n’est plus dans l’effort pour prendre soin de soi. On n’est plus avec soi. Perturbé par la musique et les indications chronométriques, on ne libère plus son cerveau qui ne se relâche plus pour pouvoir mieux se débrider. C’est probablement un signe des temps que de vouloir se mesurer en permanence pour se prouver qu’on existe, alors qu’on ne fait que s’abrutir. Le paradoxe est que notre époque fait la promotion des retraites dans les monastères ou autres temples, ou encore les séjours en Cure.

C’est dans le silence qu’on se retrouve. C’est peut-être ça qui effraie. Le silence est perturbant et souvent effrayant, au début, mais c’est la fondation qui permet de se reconstruire en profondeur pour mieux se libérer. Débrancher… »

Merci JB,  Czicksentmihaly, dans Vivre, évoquait déjà le flux jubilatoire ressenti lorsque nous vivons une expérience optimale, hors de toute mesure et de tout sentiment du temps qui s’écoule.

A lire également le dossier du Point cette semaine sur la concentration : http://www.lepoint.fr/societe/la-concentration-d-un-pilote-de-chasse-06-06-2015-1934147_23.php, et bien sûr aussi le live d’Hartmut Rosa sur notre rapport au temps.

Le pays du bonheur solide


Dans ses exercices de méditation, Christophe André nous invite à « ressentir la posture de notre corps, assis bien droit, pareil à une montagne pleine de dignité ».

Métaphore puissante, la montagne associe à la stabilité de la conscience, qu’elle nous aide à renforcer, une notion de dignité valorisante et motivante. L’objectif est toujours de nous entraîner à ressentir « ce qui est déjà là », tout en laissant se développer un sentiment de pouvoir calme et rassurant. C’est un terrain solide où nous pouvons ancrer nos résolutions les plus ambitieuses, tandis que les nuages de nos idées passent et s’effilochent. On pense au vers d’Apollinaire, dans le Pont Mirabeau : « vienne la nuit, sonne l’heure, les jours s’en vont, je demeure ».

Et la montagne, aussi, demeure.

Justement, les montagnes pleines de dignité ce n’est pas ça qui manque en Suisse, pays champion du bonheur (ou du bien-être?) lien ici , en troisième position derrière le Danemark et la Norvège.

« Quels sont les critères de ce sondage réalisé sur 156 pays entre 2010 et 2012? » s’interroge le journal 24 Heures. Réponse :  » ’emploi, la liberté d’opinion et politique, l’absence de corruption, le soutien social ou encore la bonne santé mentale et physique. »

Dans ce pays où les rochers ont des formes de Toblerone, un étranger ne manquera pas de proposer quelques critères supplémentaires, et particulièrement le sens de la sécurité que procure le fait de vivre dans un environnement stable, au propre comme au figuré.

Courir en forêt, ou le long des coteaux Suisses, sur les flancs du Jura surplombant le Léman, multiplie les occasions d’apercevoir des sommets enneigés, loin par-delà les eaux du lac, tandis que les odeurs de foin coupé, d’herbes fraîches ou de feuilles chatouillent agréablement les narines.

Et même par temps maussade, on sait qu’il y a, derrière les nuages, quelque chose d’inaltérable et d’éminemment solide, à portée d’esprit, comme un bon gros carré de chocolat noir posé sur une épaisse tartine de pain.

Signalons en conclusion dl’excellent supplément culturel du journal le Temps qui publie les résultats d’une toute récente étude sur le bonheur, lien ici.

Et si vous cherchez une musique inspirante à écouter en courant – ou en marchant, ou en ne faisant rien – je vous propose Lili of the valley, de la bande-son du film « Pina » de Wim Wenders, dédié à la grande chorégraphe allemande.

Lien ici

 

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