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Ancrage élévation (guérir avec Matisse)


Double mouvement : faire corps avec la trame vivante, matérielle, du monde;

Aspirer à des états de vie, de perception, de vibration plus nobles et plus lumineux que l’existant, ne pas s’en contenter.

Si j’ai tellement recherché l’ancrage, c’est que le danger qui me guettait était de perdre tout contact avec le sol, le terreau, le terroir. Je me suis longtemps nourri de concepts et d’information pure, captivé par d’étincelantes constructions intellectuelles comme celles d’Edgar Morin, introducteur en France de la systémique et de la complexité.

Pour guérir de la séparation, j’ai d’abord recherché l’immersion dans le monde, le sentiment océanique. J’ai cessé de fumer pour retrouver l’immense richesse des sensations olfactives. J’ai fait transpirer mon corps, renforcé mon coeur, redressé mon dos pour mieux respirer. Nager fut un délice. Palmant parmi les poissons et les coraux des Philippines, j’ai connu la fluidité parfaite, appris à régler ma flottaison pour évoluer sans effort, au plus près des fonds sablonneux, sans abîmer d’un geste maladroit les trésors vivants qui m’entouraient. J’évitais de troubler la limpidité des eaux d’une palme un peu lourde ou, produisant des bulles en excès, d’effaroucher les poissons clowns et les rougets endémiques. La discipline exigée du plongeur, la coordination et la sobriété des mouvements, la conscience de soi et de son impact sur l’entourage immédiat ouvraient l’entrée du pays des merveilles.

Nouveau terrien, j’ai cherché dans l’action des sensations fortes, et je les ai trouvées.

Mais le besoin d’élévation demeure. Le besoin de finesse, de légèreté, de respiration dans la singularité assumée. Le désir de toucher de plus beaux visages, du bout des doigts.

Suivre des yeux, fasciné, le mouvement ascendant du pygargue, porté par les courants aériens plus haut que les nuages, vers la partie la plus lumineuse du ciel au-dessus des Alpes.

Ancrage, élévation. S’émerveiller du travail évolutif à l’oeuvre dans la transformation des plantes, sur des millions de générations, jusqu’à se hisser à la hauteur du désir de l’oiseau pollinisateur pour danser avec lui. Pétales, corolles, étamines, couleurs et formes affinent sans cesse ce langage d’un raffinement inouï que l’on peut apprécier dans l’humble véronique de perse ou le myosotis.

Vibrer avec l’élan de l’amoureux, transporté vers celle qui se laissera peut-être, ou non, convaincre de l’aimer à son tour, sur une scène de théâtre ou dans la vie. Pleurer lorsqu’elle le quitte et lorsqu’ils se retrouvent.

Cultiver le courage de rejeter la haine, la colère et toutes les passions tristes. Sculpter en soi l’espace de l’Autre.

Ancrage, élévation : ces deux élans se tressent en une spirale de vie, plus intense et plus belle.

Rechercher consciemment la beauté.

Aimer, avec Matisse, une version plus subtile de la présence au monde, allégée jusqu’à la couleur pure, en apparence immatérielle, dansante et joyeuse. Epouser cette joie, dans la ferveur et l’oubli de soi. Dans la reconnexion à soi. Se confronter à l’oeuvre rugueuse d’un Georg Baselitz, paroi verticale obligeant le regard à prendre son élan tel un skate face au mur de béton. Se laisser emporter, vers le haut, vers le vide, oser, lâcher prise.

S’élever, donc, mais vers quoi?

Question mal posée. Le pygargue épousant les courants ascendants ne cherche pas à se rapprocher du soleil. Il prend de la hauteur pour étendre son champ d’action. L’artisan, le musicien, le chirurgien qui passent une vie à perfectionner leur geste, l’actrice assouplissant sa voix, aiguisant son sens de l’observation pour mieux incarner ses personnages, l’humoriste améliorant son spectacle soir après soir : tous recherchent, et pratiquent, une forme d’élévation. C’est en eux le mouvement de la vie cherchant à donner le meilleur d’elle-même.

Guérir


Qu’est-ce que guérir ? Et de quoi guérit-on au juste ?

Il y a tout juste vingt ans, j’ai failli mourir. L’assassin potentiel n’impressionne guère par sa taille :  de couleur sombre, le moustique « aedes aegypti », qui peut se reconnaître par les marques blanches bien visibles sur les pattes, ne mesure pas plus de 5 millimètres.  Originaire d’Afrique, on le trouve maintenant dans les régions tropicales à travers le monde. Il est connu comme le porteur de la fièvre jaune, du chikungunya, et, pour ce qui me concerne, de la fièvre dengue.

Arrivé depuis à peine quinze jours à Manille, métropole grouillante de vie, bruyante et colorée où ce cousin du moustique tigre pullule pendant la saison des pluies, je ne m’étais pas méfié lorsque les premiers symptômes se sont manifestés. Au bout de deux jours d’une fièvre intense et de vomissements dévastateurs, un transfert à l’hôpital s’imposa. Le diagnostic fut confirmé : c’était bien la dengue, un virus dont on peut mourir en deux jours par hémorragie interne. La perspective était ignoble. Je voyais mon corps se vider, perdant tout ce qui nous attache au sentiment de dignité humaine.  Les médecins m’annoncèrent qu’ils me feraient des prélèvements sanguins toutes les deux heures et, si le taux de plaquettes diminuait au-dessous de 80, ils devraient se résoudre à une transfusion. Le scandale du sang contaminé venait de secouer la France, et je n’étais pas vraiment rassuré à l’idée d’un sang étranger venant remplacer le mien, mais entre ce risque et celui de l’hémorragie interne, le choix était clair.

Après les dernières visites, ma chambre s’est transformée en une zone d’isolement sensoriel, émotionnel et clinique, dans lequel plus rien de ce qui nous rattache à la vie n’existait. La nuit s’étendait devant moi, non comme l’opposé du jour, mais comme un espace désert à traverser : des heures pures et vides, uniquement rythmées par l’entrée et la sortie des infirmières venant effectuer les prélèvements sanguins. Pour ne pas les inquiéter, j’avais refusé de prévenir mes parents restés en Europe, et j’ai donc guetté les résultats des examens, de deux heures en deux heures, seul dans un silence adouci par le ronronnement de la ventilation et le cliquetis des chariots dans le couloir éclairé d’une lumière verdâtre. Par moments, les portes battantes s’ouvraient, se refermaient. Le taux de plaquettes descendait, descendait. 110, 100, 90. Je voyais s’approcher le moment où il faudrait se résoudre à la perfusion. Et puis, vers quatre heures du matin, il a commencé à remonter. Si j’en avais eu la force, j’aurais embrassé l’infirmière porteuse de la bonne nouvelle, une Philippine discrète, professionnelle et chaleureuse, aux gestes incroyablement précis et rassurants. Au milieu de mon délire, son sourire tropical, sa petite voix flûtée, sa présence rayonnante dans sa blouse verte impeccable et sa coiffe d’un blanc immaculé, alliait la douceur fruitée d’une mangue avec la rigueur scientifique d’un électrocardiogramme.

Dans les jours qui suivirent, toute l’équipe médicale me dispensa des soins aussi compétents qu’empathiques, et cette gentillesse renforça encore mon amour pour ce pays et pour ses habitants. J’acceptai leur bienveillance avec une gratitude infinie. La convalescence fut longue et difficile. J’étais épuisé, incapable de soutenir mon attention plus de vingt minutes, mais heureux et soulagé d’avoir échappé à une fin répugnante. Les amis, les collègues défilaient dans ma chambre, qui devint rapidement une annexe du bureau. On riait beaucoup. Leur humour cocasse, délicat, jamais malveillant, détendait l’atmosphère. On élaborait aussi de nouvelles stratégies commerciales, qui m’aidaient à me projeter dans le futur proche et l’action. Cela participait aussi au processus de guérison. J… nous insufflait son inépuisable énergie sans faire part de ses inquiétudes. Tandis que mon corps se reconstruisait, nous reconfigurions l’avenir de l’entreprise et celui de toute la profession.

Et puis j’étais bien entouré. « Ate » L… prenait soin de moi, me nourrissait, veillait sur ma faiblesse avec l’attention d’une mère de substitution.  A travers elle, sa présence, ses silences bienveillants, ses remarques empreintes du bon sens populaire typique des provinces du Nord, se nouait un pacte profond entre moi et ce peuple accueillant, maltraité, sous-estimé par les autres comme par lui-même.  Au-delà même des Philippines, c’était toute l’Asie qui proposait ses secrets millénaires pour contribuer à ma guérison. Mais de quoi fallait-il guérir ? Peu à peu cheminait en moi le sentiment d’être longtemps passé à côté de quelque chose d’essentiel, et ce quelque chose, aujourd’hui, se présentait, mangue mûre, savoureuse, à cueillir et à déguster. La vie était là, d’une richesse incroyable. Elle prenait mille visages, et chacun de ces visages avait quelque chose à me dire.

Un proverbe asiatique énonce que « lorsque l’élève est prêt, l’enseignant apparait ».

Quelque temps plus tard, Renée V…, l’excellente ambassadrice de France aux Philippines, m’offrit un livre de David Servan-Schreiber qui venait de paraître en France. Sous le titre générique de « Guérir », il décrivait, en une dizaine de chapitres, des thérapies aussi variées que l’EMDR, aujourd’hui largement utilisé pour guérir des traumatismes, la cohérence cardiaque, la méditation en pleine conscience, et d’autres approches pour guérir de l’anxiété, du stress, voire de la dépression sans médicaments ni psychanalyse. Un long chapitre consacré à la Communication Non Violente me fut d’une grande utilité dans mes rapports avec les Philippins des diverses couches de la société.

Beaucoup de ces thérapies ou de ces approches reposaient sur le principe de la non-dualité entre le Soi et le monde. Le Talagog, langue des Philippines, avait pour cela un concept, « kapwa », imparfaitement traduit par le mot français « empathie ». D’une grande richesse sémantique, il incluait la notion de coresponsabilité agissante, au-delà du fait de « sentir avec l’autre ».   Peu à peu, je comprenais que ce sens de la responsabilité reposait sur la conscience physique, émotionnelle et morale de l’impact de nos actions sur les autres. C’était le ressenti du rugbyman dans la mêlée, l’attention du musicien accordant son instrument à celui des autres, la retenue au moment d’énoncer des paroles blessantes, un arrondi des gestes, une pudeur dans les regards, une perception si précise de la présence des autres que, même dans la foule la plus compacte, les Philippins se heurtaient rarement, comme si leurs corps étaient guidés par de puissants radars.

Ce dont il importait de guérir, c’était précisément de la séparation d’avec le monde, avec soi, avec les autres. Guérir, ce n’était pas fusionner avec le monde, mais apprendre à trouver moyen d’être, de penser, de sentir et d’agir en plein accord avec  le Soi déployé dans toute sa singularité musicale, quantique, à la fois onde et particule, écoute et résonance.  

Depuis quelques temps, mon cœur bat trop vite. Son rythme connaît des irrégularités préoccupantes, et je vais devoir retourner à l’hôpital en pensant avec gratitude au moustique, aux Philippins, à toutes celles et tous ceux qui m’ont généreusement dispensé leur enseignement. J’étudie les livre de Baptiste Morizot, d’Estelle Zhong Mengual et de Philippe Descola qui nous proposent d’établir un autre rapport aux espèces non humaines, plantes ou animaux.  Une sorte de kapwa occidentale, éclairée par la connaissance, enrichie par les relations nouées entre égaux, par l’acceptation de l’altérité, de sa valeur, animée par la recherche, en toute humilité, mais joyeusement, de notre juste place.

Aedes aegypti

les toits de Paris


Quartier d’Alésia, septième étage.

Si vous habitez la moitié nord de la France, il fait un temps splendide, c’est un régal. Un doigt de lumière matinale se promène sur  les plaques de zinc, sur les cheminées orangées d’où s’échappe un panache de fumée rose comme dans les gares de Claude Monet. Un pied de vigne vierge a grimpé le long d’un mur jusqu’à ces hauteurs, projetant des taches d’un rouge vif au milieu des pigeons. C’est un jardin de toits, tout hérissé d’antennes, un morceau de Paris qui s’amuse à surprendre l’œil et joue de ses clichés. On voudrait être un chat pour explorer la proche terrasse où d’épatants palmiers prennent le soleil, encadrant la tour Montparnasse. Un avion, plus haut, suit un vol d’oies sauvages en route vers l’Afrique du Nord. Dehors, il doit faire un peu frais : nous sommes au début d’octobre et vous aurez sans doute envie d’en profiter, de cocooner ou de sortir. Moi, je lis, blotti dans la chaleur de ma ville comme dans un nid douillet. Mon plumage et le ciel grisonnent en parfaite harmonie, mon œil s’arrondit comme celui d’un pigeon et j’ai prêté mon appartement à des touristes chinois pour le week-end. Bientôt, ce sera l’heure d’écouter la voix merveilleusement timbrée de Jean-Claude Ameisen sur France Inter (sur les épaules de Darwin). Il explique aujourd’hui la manière dont les cellules-grilles du petit raton mémorisent les parcours qu’il révisera, plus tard, dans son sommeil, tandis que les cellules-limites cartographient les frontières de l’espace. Je crois que l’émission d’aujourd’hui s’intitule « le cartographe EST le territoire », ou « le corps cartographe ». A podcaster ici : LIEN.

Tout de même, s’il faut se réincarner, je préfère revenir en chat qu’en rat. En attendant, comme eux, j’explore et je cartographie mon territoire d’un pas prudent. C’est que la ville d’en bas regorge de pièges qui vous envoient des décharges électriques en plein cœur au moindre faux pas. Mille souvenirs aiguisés comme des lames de rasoirs nous guettent, cachés dans une affiche de métro ou la devanture d’un Western Union. Tout, dans Paris, me crie les Philippines et mon enfant perdu. Quel savant fou fait, sur nous, de si cruelles expériences? Se réjouit-il de nos apprentissages? Nous collera-t-on des électrodes sur le crâne pour mesurer la profondeur et l’intensité de nos chagrins ?

Mais non. Réagissons. Lâchons ce fil morose et revenons à nos terrasses. Le malheur est une illusion comme une autre, un tic de langage à bannir d’autant plus violemment qu’il se croit tendance.

« Malheur, dieu pâle aux yeux d’ivoire / tes prêtres fous t’ont-ils paré? / Tes victimes en robe noire/ ont-elles vainement pleuré? / Malheur, dieu qu’il ne faut pas croire » (Apollinaire)

Si vous aimez les toits de Paris, sa lumière et ses chats, vous pouvez feuilleter ce livre d’aquarelles de Claude Moreau :

http://www.leseditionsdupacifique.com/Feuilleter/978-2-87868-123-9/object_files/template.htm

Coup de cœur aux artistes Philippins


Les artistes Philippins sont à l’honneur à Sète avec l’exposition de Manuel Ocampo « Manila Vice ». L’artiste et curateur ambitionne de faire de Manille une ville d’art mondiale. Lorsqu’on est familier de la vitalité de la scène créative des Philippines, on ne peut que souscrire et lui souhaiter beaucoup de réussite.

A voir au Musee International des Arts Modestes (MIAM Museum, http://www.miam.org) in Sète, France.

http://www.ambafrance-ph.org/Manuel-Ocampo-s-Manila-Vice-Making,2348

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Et si vous n’avez pas le temps d’aller jusqu’à Sète, ne ratez pas la splendide exposition du Quai Branly : Philippines, archipel des échanges

http://www.quaibranly.fr/fr/programmation/expositions/a-l-affiche/philippines-archipel-des-echanges.html

le bonheur hommage à HappyLab


Le bonheur n’est pas sûr
le bonheur n’est pas clair
le bonheur n’est pas rose

Du moins quand il se pose
Il a les pieds sur terre
Le bout du nez en l’air
Le bonheur c’est d’y croire
Et d’aimer courir
C’est aller vite agir
sans calculer ou
Après avoir bien calculé
C’est tout ce qui reste
A la fin d’oublié
Pas de recette, un dé jeté
Le bonheur c’est malgré
Le bonheur c’est carré
le bonheur c’est d’avoir
l’amour devant, dedans et tout autour
Le bonheur c’est tout près
le bonheur c’est jamais
Le bonheur c’est toujours
le bonheur c’est qui sait
Le bonheur imparfait
C’est parfait

Remerciements à Joanna Quelen et à toute l’équipe du HappyLab

http://www.happylab.fr/category/quisommesnous/

Avec la voix de Nicole de Chancey à l’oreille, « imparfaite dans son imperfection »

Rire avec Plonk et Replonk


Soif de couleurs, envie de rire. La météo nous annonce moins quinze degrés pour vendredi, un temps à ne pas mettre une famille de cosmonautes dehors pour paraphraser la (célèbre?) cartes postale de Plonk & Replonk. Leur « percement de l’Arc de Triomphe par le Baron Haussmann » signalé par le blogger Jean-Louis Foucart écrase de toute son absurdité les discours distillés depuis Davos, face (mal) cachée de la Suisse. Le rire, surtout lorsqu’il est bienveillant, est un grand facteur de résilience, et pour l’équilibre il y a bien sûr la Balance bretonne.

Envie d’azur et de nuages flottant haut dans le ciel, envie d’aller voir aux Philippines si le ciel est toujours aussi bleu vu depuis le fond de la mer, si les corps cosmiques tournent toujours plus vite au-dessus de nos têtes et sur la plage de Boracai, envie de goûter des mangues éclatantes et des sourires complices.

Envie d’épouser l’énergie de ce monde qui vient, parfois sans doute un peu trop vite. Ah va pour le vertige!

The Banahaw protocol


Appreciative living is an art Filipinos have mastered and kept improving ever since the remote days when heir ancestors were building the rice terraces. Indeed I can sense a strong connection betweeen NLP, or neuro-linguistic programming as a way to connect with the world of our sensations and emotions, and what they call « Kapwa ». This is a story about finding the new Jerusalem in the jungle, and enjoying ll of it tremendously.

The day before I left Manila for the lush slopes of Mount Banahaw, a bitter American handed me a CD with all sorts of recommendations the business community had prepared for the new president of the Philippines. His disappointment was obvious, as he uttered “this is our last attempt to make policy for this country”. Indeed, his intentions were good. Many years ago, even I had shared some of these hopes for a better, more efficient, fairer business environment. But this was no longer the case. No longer did I dream of changing this place and these people against their own will, or lack of it. I was going back to Banahaw to connect with this country on a different, deeper emotional level. If anything was to change, it would have to come from the heart, not from any sort of rational, however thoroughly prepared blueprint. Things would happen at their own pace.


Besides I was there to learn, not to teach. Having just completed my coaching and Neuro-Linguistic Programming studies, I was coming here to close a cycle and “live the experience”, whatever this entailed for me. Last winter, on several occasions during the NLP exercises, I had come back to that place in imagination, building it as an anchor, a source of joy, inspiration and positive energy. Now, I was going back for real, and I was looking forward to trekking in the forest with my friends, enjoying a bit of physical exercise among the unique flora (oh, the rafflesia banahawensis).

On my first trip to the Philippines, in the mid-90ies, my friend Jeannie Javelosa started telling me about the mysteries of Mount Banahaw, a place considered sacred by many Filipinos and spiritual-minded people around the world, including Tibetan and even Catholic monks, who would congregate there to meditate and revel in the place’s psychic energy. She would tell me how the inactive volcano was renowned among those circles for the healing powers of the water streaming down its slopes and the spirits supposedly roaming in its forests. Most amazing was the web of superstitions and legends that surrounded the place like the clouds hiding its summit from the eyes of the trekkers. What made the story even more compelling was the contrast with the nearing Mount Cristobal, a place of dark energies where some people were said to be practicing black magic. Indeed, the Philippines had become a very fashionable place among New Age communities. Pilgrims started coming from all over the country, until the Department of Environment had to close down most of the trails leading to the summit until such time that the place regenerates itself. Today, some of the best pictures of Mount Banahaw and its rare flora can be seen on Youtube.

As for me, always a taker for a good story and a lover of nature, I was mostly excited at the perspective of spending a week-end in the mountain, enjoying the fresh air far from the unbearable pollution of Manila. The first time I finally got there with Jeannie, we met a fantastic story-teller who would rant on and on about the mountain spirits, dwarves, elementals and even UFOs making appearances in this “New Jerusalem”. Never mind the fact that the guy got a bit carried away in his own tales. For me, what made this experience memorable was the deep yet fun conversations with my friends, the walks in the mountain and the practice of yoga on a balcony overlooking the landscape. Jeannie’s house was perched high above the forest, and from there the view was breathtaking. As we went through the various yoga movements, I was enthralled by the smell coming from the flowers of a rare vine, the waves of green foliage filling the whole space all the way to the horizon and the view of the Mount Salakot just on the other side of the slope. Far from being the idyllic quiet spot in the mountains, the place was vibrant with the presence of numerous animals, birds and insects whose voices came together in a noisy background. In the middle of the night, for no apparent reason, and the sunrise being still hours away, roosters – dozens of them – would start crowing, as if sounding the alarm for some mysterious presence, thus waking up all the dogs who would start barking furiously for hours. In the morning, exhausted, I spent an hour looking at a procession of ants going up and down a branch, my eyes moving ever more slowly until I was captivated by a drop of water bending a leaf under its weight. I became aware of all the nuances of green, as I walked down the moss-covered steps carved in the old volcanic reddish stone. The place was eerie. It reminded me of the strange island where Tintin and his companions are taken hostage in the album “Flight 747 for Sydney”. The comparison was not entirely absurd, as I was told the next morning there were some rebels hiding on the other side of the mountain. UFOs, on the other hand, did not manifest themselves.

Back in France, I kept returning to Mount Banahaw in my mind whenever I would look for a peaceful – and powerful – resource-image. During my training in Neuro-Linguistic Programming (NLP), I would meditate in a giant lotus flower shaped after the memory of the vine flowers growing under Jeannie’s balcony, my mind wandering over the mountain’s green crests.

Of course, I was excited to go back there during my latest trip to the Philippines. My coaching teacher, Nicole de Chancey, used to say that no learning process would be complete until we “had it in the muscles”, so it was a wonderful experience to practice yoga in Jeannie’s high-perched house after a particularly long trek to the dark mount Cristobal. My friends compared disciplines, the Asian and the Western approach, meditation, NLP, while sitting on our yoga mats on the balcony. They told me about Kapwa, the sense of the other in the self, which is a mode of perception more than just an concept. True enough, my muscles had stored all these memories, and they all came back. I was now ready to become a teacher and a healer myself. Having given up on the idea to change this country and its people, they opened up to me and started sharing their secrets. Alas, the bitter American would never understand. These were not things you could store on a CR-Rom.





IF YOU WAN TO KNOW MORE ABOUT MOUNT BANAHAW:

http://www.pinoymountaineer.com/2007/08/mt-banahaw-2158.html

http://www.malapascua.de/Volcanoe-Map/Mount_Banahaw/hauptteil_mount_banahaw.html

http://en.wikipedia.org/wiki/Mount_Banahaw

Mount Banahaw (alternative spelling: Banahao or Banájao) is one of the active volcanos in the Philippines. Part of a volcanic group, it is located along the boundary of Laguna and Quezon provinces, on the island of Luzon, in the Philippines.
The mountain and its environs are considered sacred by the local residents because of its « holy water », which allegedly have beneficial qualities, issuing forth from local springs and its « puwesto s, or the « holy sites ». These are composed of unique, natural features such as rocks, caves and springs with shrines erected in, on or around them, their location having been revealed to a man in the Spanish Era by the Santas Voces or the « Holy Voices ». It has another of this mountain and it was named as Mount Banahaw de Lucbán.

The term Banahaw is not known to many people but some beliefs attribute it to the description of a holy being. This mountain has a rock with the footprint of an unknown being and supposedly, this was the origin of the name of the mountain. Banahaw is very close to the modern Tagalog words banal (holy, sacred, divine) and daw (a word used in quoting another speaker; when appended to sentences, daw indicates slight disbelief or uncertainty in the veracity of the quotation’s content). Combined, the two words mean « [it is] probably/supposedly sacred ». The way the phrase was transcribed in Baybayin, the ancient syllabary used in writing Tagalog prior to the introduction of the Latin alphabet, finally produced the term  » Banahaw

Back in the Philippines


And so I am back in the Philippines, surrounded by familiar and unfamilar faces. It starts in Abu Dhabi airport, as hundreds of Filipinos working in the Middle-East, otherwise known as Overseas Foreign Workers (OFWs), prepare to board the plane. A unique ambience, made of excitement and nostalgia, as the accumulated pain and repressed fears comes closer to the surface. Some of these people have not been home for years. They long to see their relatives, to feel home again, and safe. That feeling is so palpable and moving, even a foreigner like me gets the goose bumps.

Then in Manila, the pervasive sound of laughter bubbles up around me, in malls, in elevators, in meeting rooms, in the street. People keep laughing all the time, about anything, and this is so refreshing. Its a question of attitude, a way of looking at life.

My French friends find it hard to believe I am actually here for work, but how can I ever explain how much work here can at the same time be pleasure? French companies based here know about this unique mix of professionalism and joie de vivre, as can be seen on their facebook page. Go for pink and apple green, ye super-accountants, engineers, managers!

When you are really good at what you do, and you work so hard, you can afford to go a little crazy from time to time.

And of course the culinary trip to pampanga with a bunch of ladies and art-buffs, the Beti church, Art-Nouveaux houses lost in the middle of dusty villages and the splendid swamps where birds come from all over Asia. As always the best stories come at sunset, like the great-grand mother who would be taken out of her grave by the villagers once a year for all saint’s day and exposed for a couple of days until she was authorized to go back rotting undergrouond. Now I understand better the crazyness of certain Filipino movies.


And by the way, who murdered the cute little turn-of-the Century koleyiala?

Lola en DVD


Lola, le film de Brilante Mendoza sur les deux grand-mères Philippines aux destins croisés, vient de sortir en DVD. On en parle sur Discobus, un extrait :

« Amateur de voyages ? Alors, il vous suffit de regarder les films de Brillante Mendoza, réalisateur philippin, et vous serez au cœur de Manille avec les Philippins, ce qu’aucun tour-opérateur ne pourra vous proposer.
Lola (qui signifie ‘grand-mère’ en tagalog) est un film qui tient davantage du documentaire que de la fiction. C’est l’histoire de deux grands-mères. La première met tout en œuvre pour donner une sépulture à son petit-fils tué par un voleur de gsm. La seconde est la grand-mère du meurtrier et se bat pour le faire sortir de prison avant son procès. (…). Ici, dans « Lola », c’est l’émotion, la retenue, la dignité.

A voir aussi : John-John, la dernière journée d’un enfant dans son « foster home » avant d’être adopté par un couple d’américains. J’aime beaucoup la manière respectueuse de filmer cette famille pleine de dignité : le père travaille, le fils va au collège, chacun s’occupe et fait de son mieux. Mendoza casse les clichés pauvreté = drogue, alcoolisme, déchéance. En attendant la sortie à Cannes de son dernier, Captured, avec Isabelle Huppert. Et puisqu’il n’y a pas que des bidonvilles dans ce pays, voir aussi Limbunan de Gutierrez Mangansakan, qui se passe en milieu rural.

Et ne pas oublier aussi « L’éveil de Maximo Oliveros« , d’Auraeus Solito, un film plein de fraîcheur qui avait enchanté les cinéphiles en 2008.

Rire aux Philippines


Je me demandais que rapporter des Philippines.

Le rire, bien sûr, comme ce master qui pratique le yoga du rire sur des policiers.

On lui enverrait bien un billet d’avion pour le championnat mondial d’empathie, avec visa indéfini.

Parlez-moi d’humour


En route pour les Philippines, le pays du peintre Juan Luna et du cinéaste Brilante Mendoza. C’est dans ce pays que j’ai pour la première fois fait l’expérience du regard qui se décentre, en apprenant à voir le monde selon la grille de lecture d’un autre peuple. Auparavant, il y avait eu l’Allemagne, et Singapour, mais la passion intellectuelle ne remplace pas l’empathie.

Les philippins sont à juste titre fiers d’avoir inventé en 1986 la première révolution sans effusion de sang, le People Power qui renversa le dictateur Marcos en 1986.

Alors que nous entrons dans l’âge de l’empathie, il me sembe que ce peuple a quelques points d’avance. Plus les rapports entre les pays, les cultures et les individus seront placés sous le signe d’une compétition exacerbée, plus il sera nécessaire de comprendre l’autre sur une base intuitive et non intellectuelle ou transactionnelle. (Vous savez, avec cette chose palpitante et rouge qui s’appelle le coeur).

Se mettre à la place de l’autre un instant, voir avec ses yeux, entendre avec ses oreilles avant d’en revenir à sa propre carte du monde : quand la simple gentillesse ne passe plus pour de la naiveté, mais pour un stade avancé de l’évolution humaine.

Il faudrait parler de leur modernité métisse traduite approximativement par le concept de « Mashable Manila« , de la musique et des Black Eyed Peas, (*) en attendant le Basquiat de l’Asie, car il viendra d’ici, c’est sûr et certain.

Pour l’humour, en tout cas, et tout particulièrement sous la forme douce-amère, infiniment cocasse et généreuse de l’autodérision, ils méritent la palme, la couronne et, allez, même l’écharpe.

((*) l’un des chanteurs de ce groupe est d’origine philippine et chante en Tagalog sur certains titres.

Manille remix


En route pour Manille!

Que rapporter, sans appareil photo? Des dessins, des odeurs, des sons, des couleurs, des saveurs et surtout des conversations entrelacées les unes aux autres comme ces paniers que tressent les femmes des montagnes.

La jeunesse d’Asie regarde l’avenir droit dans les yeux, affronte courageusement les obstacles et rit, rit, rit à pleine gorge. Mashable Manila : le remix créatif est-ouest ne vaut pas que pour la mode.

Travailler avec eux, c’est un plaisir, un honneur, une récompense.

J’aimerais tant que l’on regarde aussi ce côté-là, cette énergie bouillonnante, sans nier la pauvreté, la saleté repoussante, la pollution qui vous pique les yeux, vous brûle les poumons. Juste une question d’équilibre.

Que l’on rende justice à leur diginité. Et pour ceux qui n’ont pas le temps ou le goût de s’y rendre, allez voir les films de Brillante Mendoza, en commençant par le bouleversant John John ou Lola, celui sur les deux grand-mères, sorti l’année dernière. Je n’avais encore jamais vu autant d’empathie dans un traveling.

Spot Philippines


Explosive énergie  du Sud
Surfant sur le code et l’image
Pour les kids un spot idéal
Dramang drama, fashionista!


Frères humains que rien n’efface
Au matin quand revient la vie
C’est votre sourire à mes lèvres
L’hiver à s’en mordre les doigts

Contre-plongée vers la surface
Dans un nuage effervescent
De bulles, remonter, comme on naît,
Vers le soleil des Philippines

l’empathie n’est pas une maladie


L’empathie n’est pas une maladie », déclare Frans de Waal interviewé dans le Monde. L’auteur de l’Age de l’empathie explique l’importance de l’empathie et de la coopération dans l’évolution de l’humanité. Citation :  « en valorisant la compétition au détriment de l’empathie, nos organisations auraient fait fausse route ». Puisque nous sommes de plus en plus nombreux sur une planète dont la taille n’augmente pas, il va bien falloir apprendre à nous écouter, et à nous entendre.

 

 

le Bulul, gardien des rizières

L’empathie désigne notre capacité à ressentir avec l’autre,  ce qui ne signifie pas se laisser envahir par ses émotions. Or, tous les bons coachs vous le diront, pour être en mesure d’aider, il faut d’abord savoir préserver son intégrité, poser ses limites, protéger son territoire. La bienveillance trouve ainsi son point d’équilibre.

1. Une sagesse mise en pratique par les Ifugao, peuple du nord des Philippines qui ont construit et continuent d’entretenir les rizières en terrasse depuis 2000 ans. Ces montagnards farouchement indépendants ont pour coutume d’installer des statues en bois, nommées bululs, à l’angle des rizières, autant pour les protéger que pour les délimiter. Bienveillance et vigilance vont de pair. Les Philippins, connus pour leur grande hospitalité, n’en posent pas moins des règles. De même, l’empathie ne signifie pas renoncer à son intégrité, mais se décentrer juste suffisamment pour ressentir avec l’autre. Protégeons nos rizières tout en restant à l’écoute.

2. « L’empathie n’est pas une maladie », déclare Frans de Waal interviewé dans le Monde. L’auteur de l’Age de l’empathie explique l’importance de l’empathie et de la coopération dans l’évolution de l’humanité. Citation :  « en valorisant la compétition au détriment de l’empathie, nos organisations auraient fait fausse route ». Puisque nous sommes de plus en plus nombreux sur une planète dont la taille n’augmente pas, il va bien falloir apprendre à nous écouter, et à nous entendre.

3. L’émotion, source de la conscience : lire cet entretien avec le neurobiologiste portugais Antonio Damasio dans la Recherche. Si même les paramécies ressentent des émotions, il va falloir sérieusement revoir notre conception de nos relations avec l’univers du vivant.

Extrait : Antonio Damasio : « Chaque chose, selon sa puissance d’être, s’efforce de persévérer dans son être. » Cela est valable pour la paramécie comme pour l’homme et, chez l’homme, pour une cellule comme pour l’organisme entier. En termes modernes, c’est aussi dire que toutes les dispositions de nos circuits cérébraux sont, sauf accident, programmées pour rechercher à la fois la survie et le bien-être. »

Banaue rice terrasses by Mark Maranga

On se sent moins mesquin, du haut des splendides rizières en terrasse de Banaue.

Saison des jeux


Secouez-moi

 

Secouez-moi, je suis plein de rires
Mes rêves se multiplient dans l’ombre
Et mûrissent au soleil

Chercher dans le banal
Ce qu’on trouve, on le partage
Et ce que l’on partage
Enrichit


Enfants de Batangas
Votre coeur gros comme un soleil
Battant m’illumine
Apprenez-moi l’écoute

 

*Batangas, Philippines

Lundi 16 : tous des Roms


Mail inattendu de l’administrateur du haplo group R1B1 (Genographic project) : la lignée paternelle serait originaire d’un petit groupe d’individus fuyant l’Europe centrale où sévissait la peste bubonique au quatorzième siècle. Le fait que cette version contredise la légende familiale la rend des plus intéressantes.  On n’est plus bretons depuis 1035, alors ? Quelque chose ne tourne pas rond ? Suspense et suspicion ! Ma génération n’aurait donc pas inventé le métissage ? Quel hongrois vint, dans la nuit médiévale, greffer ses gènes sur l’ancienne souche bretonne ? « Génétique en bandoulière », chantait Noir Désir. Possibilité d’un scénario. Famille, tes mystères à l’heure des séries!

Le rire éraillé de Margot résonne dans la  nuit sarthoise, grave-aigu-médium étiré, les poumons dilatés, ravie de son effet. C’était donc ça la bombinette, le mail annoncé en gare de la Rochelle? On se croit tranquille comme un âne du Poitou broutant son pré salé depuis des générations et l’on se découvre mouette, migrant-migrateur, mobile, nomade, un tapis volant sous les pieds, zoup-là ! Sur quelles routes narratives cherche t-elle donc à m’attirer ? L’Europe est si vaste, et l’histoire de ses populations si compliquée. Je me connecte sur le site du Genographic project où de sinistres flèches rouges retracent la progression de la Peste Noire au 15ème siècle. Terrifiante hypothèse… Mes ancêtres auraient-ils apporté le virus dans leurs bagages ? Un européen sur trois succomba à l’épidémie. Me reviennent en mémoire les peurs ressurgies en Asie lors de l’épidémie de SRAS, le journaliste qui faillit être lynché dans un petit village aux Philippines parce qu’il revenait d’une province où se trouvait une personne contaminée, l’ostracisme dont la population de Singapour avait frappé les infirmières philippines, les seules qui voulaient encore bien s’occuper de leurs malades. On croit toujours que la peste, c’est l’autre, alors qu’on la porte en soi depuis des siècles.

Plus j’en apprends sur l’histoire des migrations humaines, plus je suis fasciné par ces multiples croisements, ces routes anciennes qui nous ramènent par mille détours à l’origine commune, à l’unité de l’espèce humaine. Pendant ce temps-là, le gouvernement de la France met en scène l’expulsion des Roms. On se croirait revenus au temps de Philippe le bel lançant la chasse aux juifs. C’est donc cela, le retour au moyen âge annoncé par Nicolas ? Il faudrait leur envoyer un exemplaire des Bijoux de la Castafiore, où l’on voit Tintin prendre la défense de ces boucs émissaires. Tout ceci devient nauséabond, relents des années trente. Allons-bon, je vais me faire traiter de millionnaire germanopratin. (Si seulement). Ce n’est pas cette France-là que je suis venu retrouver après de longues années en Asie. A quel âge mon neveu métis subira t-il son premier contrôle au faciès ? Comment l’armer contre cette inéluctable agression ? Comment lui faire aimer la France ? Marianne, reviens, ils sont devenus fous !

 

Reviens Marianne, ils sont devenus fous!