Le soleil est plus pâle en hiver. Cela ne veut pas dire que ses rayons ne brillent pas pour nous. Simplement ils nous parviennent attiédis, ou demeurent cachés derrière un voile de nuages. Nous le savons, et nous ne cessons de l’oublier jusqu’au moment où le voile se déchire. De même, écrit Cynthia Fleury dans la fin du courage, (Lien ici), nous savons bien que le courage existe, mais certains jours il nous paraît hors de portée. C’est pourquoi j’aime cette définition de Paul Nizan qu’elle citait sur France Inter lors de la sortie de son livre, en 2011 : « le courage véritable consiste chaque jour à vaincre les petits ennemis ».
Ainsi, hier, la jeune femme qui gère l’espace de co-working où je travaille, me voyant stationné l’air un peu flou devant la machine à café, me dit avec gentillesse : « heureusement, on est jeudi». Tout en regardant couler mon café, je lui demande en quoi le fait d’être jeudi mérite une mention particulière. « Parce que », me répond-elle d’une voix encourageante, « il n’y a plus que deux jours avant la fin de la semaine ». Je tente de lui expliquer que deux jours, tout de même, mais les mots ne viennent pas, l’enthousiasme est resté au vestiaire et je repars avec mon café tremblotant au fond du gobelet.
J’aurais dû persévérer, tirer sur les mots englués jusqu’à ce qu’ils sortent.
La journée se passe, pleine de pépites : un déjeuner passionnant et plein de promesses, une présentation qui coule de source, une séance de coaching amusante et productive : le soleil s’est effectivement montré dans sa gloire, selon la formule, après dissipation des brumes matinales.
Et les mots viennent, ceux que j’aurais dû prononcer ce matin. J’aurais dû prolonger la conversation, lui expliquer que pour moi le travail est une occasion d’agir, de faire une différence même quand c’est difficile. J’aurais dû lui dire que la semaine n’est pas un tunnel entre deux week-ends. J’aurais dû la remercier pour son empathie, la féliciter pour sa capacité à sourire même aux locataires les plus renfrognés, pour le talent qu’elle met à trouver la dernière petite cuiller propre au fond du tiroir et pour cette énergie qu’elle déploie, du matin au soir, semant dans l’escalier des paillettes de lumière.
Chaque journée compte.